Baobabs entre terre et mer (56 mn)
Par leur taille impressionnante et leurs formes originales, les baobabs figurent parmi les arbres les plus remarquables. Encore mal connus à Madagascar, les géants sont actuellement menacés par la déforestation. Pour les étudier au coeur de leurs forêts, Cyrille Cornu et Wilfried Ramahafaly partent en pirogue à balancier explorer 400 kilomètres de côtes sauvages et isolée dans l’ouest malgache !
Le film relate l’expédition. Il dévoile les nombreuses découvertes, rencontres et résultats scientifiques des deux explorateurs dans une partie de l’île très peu étudiée. Il présente des baobabs et paysages qui n’avaient pour la plupart jamais été filmés ni même photographiés !
Viva Film Festival, Bosnie-Herzégovine, Mai 2015 (Grand Prix)
Wolves Independent International Film Festival, Lituanie, Août 2015 (Best Feature)
Kolkata International Wildlife & Environment Film Festival, Inde, Octobre 2015 (Best Direction in Documentary Category)
Sondrio International Documentary Film Festival on Parks, Italie, Novembre 2015 (First Prize)
Boston Independent Film Festival, Etats-Unis, Février 2016 (Best Documentary)
Golden Camera, Kirghizistan, Mars 2016 (Best Documentary)
Terra Festival, France, Avril 2016 (Premier Prix)
International Green Culture Festival – GREEN FEST, Serbie, Novembre 2016 (Best Nature Film)
Langues : Malgache, Français, Anglais
Interview du réalisateur de Baobabs entre terre et mer
nterview donnée dans le numéro 163 du magazine globe-trotters (septembre/octobre 2015)
Naturaliste, biogéographe, chercheur, Cyrille Cornu travaille depuis une dizaine d’années au Centre de coopération International de Recherche Agronomique pour le Développement (Cirad). Il mène des recherches articulant information spatiale et biodiversité. Il s’intéresse notamment aux forêts tropicales sèches, à leur diversité biologique, à la déforestation ainsi qu’à l’impact du changement climatique. Depuis sept ans, il se consacre plus spécifiquement à l’étude des baobabs de Madagascar dont il est devenu l’un des grands spécialistes. Chaque année, il organise des expéditions originales au cours desquelles il mobilise des moyens de transport locaux pour accéder au cœur de écosystèmes forestiers où vivent les géants.
D’où vient cette passion pour les baobabs ?
Depuis mon plus jeune âge, je suis fasciné par la nature, les arbres, la forêt ! J’ai rencontré les baobabs en 1979 lors d’un séjour au Sénégal avec mes parents. Je n’étais alors âgé que de dix ans mais suis de suite tombé sous le charme. Je n’ai retrouvé les baobabs que trente ans plus tard à Madagascar. Ce sont des êtres puissants, mystérieux, passionnants. Tellement passionnants qu’il y a 5 ans je suis venu m’installer sur la Grande Île pour les étudier.
Vous organisez régulièrement des expéditions pour étudier les baobabs de Madagascar. En quoi consistent ces expéditions ?
Madagascar est la quatrième plus grande île au monde avec une superficie équivalente à celle de la France et de la Belgique ! Sur 32 000 kilomètres de réseau routier 12 000 sont praticables en saison des pluies et seulement 5 000 sont bitumés. A titre de comparaison, la France compte plus d’un million de kilomètres de routes goudronnées. On comprend que la majeure partie du territoire ne soit pas accessible en voiture. Beaucoup de baobabs poussent dans des forêts isolées, difficiles d’accès, et n’ont jamais été étudiés. Seuls les moyens de transport locaux comme la pirogue ou la charrette à zébu permettent de se rendre sur place. Il faut parfois marcher des heures. Cela fait de Madagascar une véritable terre d’aventure. En premier lieu, je suis scientifique. A ce titre les expéditions que j’organise ont pour objectif de produire des connaissances sur les baobabs, leur écologie, leur biologie mais aussi sur la manière dont les populations locales les perçoivent et les utilisent. Notre approche est originale dans la mesure où elle associe des technologies de pointe liées à l’imagerie satellitaire pour repérer les baobabs à des moyens d’investigation très « roots » lors de nos déplacements sur le terrain. Ce n’est probablement pas nouveau mais cette façon de faire est adaptée à l’étude de la biodiversité de l’île.
Vous avez visité des endroits où probablement peu de personnes sont passées avant vous. Cela signifie t-il qu’il reste des parties de l’île inexplorées ?
Il reste quantité d’endroits à explorer à Madagascar. C’est très stimulant ! Prenons l’exemple des Tsingy. Une grande partie de ces réseaux karstiques complexes n’a jamais été visitée. Il en est de même du massif du Makai qui a récemment été traversé par une équipe scientifique. Lors de nos excursions, il nous arrive de pénétrer dans des forêts où peu de gens sont passés, y compris les locaux. Dans ces lieux, les arbres ne portent pas de traces d’exploitation, la faune est proche, curieuse. On ressent une sensation étrange de calme et d’harmonie.
A Madagascar, la plupart des chercheurs de terrain sont des aventuriers dans l’âme. Y a t-il des situations où vous vous êtes senti menacé, en danger ? Qui vous accompagne et comment organisez-vous vos expéditions ?
Mon ami et partenaire de terrain, Wilfried Ramahafaly, m’accompagne à chaque expédition. Forestier de formation, il s’est occupé pendant des années de la pépinière du Cirad où il faisait germer et pousser des baobabs. Personne ne les connait mieux que lui. Chaque année, nous organisons une à deux expéditions. Je repère à l’avance les baobabs sur images satellites. En cinq ans, nous sommes déjà partis sept fois entre le cap d’Ambre dans l’extrême nord et Tuléar. Chaque voyage est unique. Par contre, il faut être aventurier et plutôt en excellente condition physique. Chaleur, vie spartiate, insectes et autres désagréments sont au rendez-vous. Les agressions existent mais elles peuvent être évitées en respectant des règles simples : ne pas circuler la nuit, se renseigner auprès des villageois sur les secteurs à éviter et surtout ne pas camper trop longtemps dans un même endroit. L’information circule vite en brousse. Sur l’île, la plupart des animaux ne sont pas dangereux à l’exception des crocodiles et des moustiques. J’ai testé les piqûres de scorpion et de scolopendre. Je les déconseille.
Les baobabs font partie du patrimoine biologique malgache mais ils sont apparemment menacés comme la plupart de la biodiversité endémique de l’île. Quelles sont d’après vous les mesures à prendre pour les protéger ?
Limiter l’agriculture sur brulis ! Cette pratique, appelée localement « hatsake », consiste à utiliser le feu pour défricher des espaces forestiers et les aménager en parcelles agricoles. Les parcelles sont exploitées deux à trois années puis abandonnées car infertiles. Il devient plus qu’urgent de sensibiliser la population sur l’impact dramatique de cette pratique sur les écosystèmes forestiers, la biodiversité, les sols et même les ressources en eau. Sur place, les choses ne sont pas simples. Les familles agissent dans l’urgence et la nécessité. Elles vivent dans une précarité extrême, au jour le jour. Le développement d’aires protégées est un bon moyen pour enrayer le processus de déforestation mais toutes les forêts ne peuvent être protégées de la sorte. Une autre solution consiste à mettre en place des règles de gestion communautaire et durable des ressources forestières avec les populations locales. Nous y travaillons au Cirad.
Les baobabs de Madagascar, de par leur endémisme, constituent un attrait touristique indéniable. Pourtant les sites accessibles où l’on peut voir des baobabs sont peu nombreux. Que doit-on faire pour faciliter l’accès aux baobabs ?
Madagascar manque d’infrastructures routières et touristiques dans les régions de l’ouest où vivent les baobabs. La mise en valeur des espaces concernés n’est pas simple et je ne suis pas certain que ce soit une bonne chose. Plusieurs sites touristiques faciles d’accès existent comme l’allée des baobabs ou encore le parc national de Kirindy Mite. D’autres se visitent dans le cadre d’un tourisme d’aventure qui demande des moyens de transport adaptés, du temps et une âme de baroudeur. Je pense notamment à la piste qui relie Morondava à Tuléar, l’une des plus belles pour découvrir les géants de la Grande Île ou encore au fleuve Mangoky, dernier grand fleuve sauvage de Madagascar, dont la descente en pirogue demande au minimum cinq jours.
Vous venez de réaliser un film documentaire sur les baobabs de Madagascar. Dites-nous en plus ?
Depuis cinq ans, nous découvrons des trésors de biodiversité. Assez rapidement j’ai eu envie de partager nos aventures avec le grand-public d’où le pari de réaliser un documentaire. C’est chose faite avec « Baobabs entre Terre et Mer ». Le film relate une expédition organisée en juin 2013 entre les villes de Tuléar et Morondava dans le sud-ouest malgache. Nous sommes partis vingt deux jours en pirogue à balancier explorer quatre cent kilomètres de côte sauvage. Le film dévoile nos découvertes, rencontres et résultats scientifiques.
Avez-vous d’autres expéditions ou films en préparation ?
Je prépare actuellement un second film sur les baobabs du nord de l’île de Madagascar et en particulier sur les deux espèces les plus rares : Adansonia suarezensis et Adansonia perrieri ! Les images sont en cours de montage. Dans les années qui viennent, j’aimerai visiter la dernière portion de côte ouest que nous n’avons pas encore explorée, entre Morondava et Majunga. J’ai également pour projet de survoler en paramoteur biplace et filmer des forêts de baobabs excessivement isolées et inaccessibles par voie terrestre.
On ne peut s’investir comme vous le faites et voyager si loin en terres malgaches sans une profonde affection pour les habitants de l’île. Quelle leçon tirez-vous de cette expérience ? Quel conseil donneriez-vous à un étranger qui veut réellement découvrir Madagascar ?
Le peuple malgache vit au rythme des éléments naturels et des traditions. Il a gardé le sens du sacré, du partage, de la communauté. Des valeurs essentielles à mes yeux. L’idéal pour découvrir Madagascar c’est de parler la langue, d’y avoir une activité, d’être impliqué dans la société ! Participer à un projet de développement, enseigner, faire de la musique, photographier… Cela renforce les liens avec le pays et ses habitants. Plus on prend son temps, plus l’île se livre. D’où la célèbre expression malgache « mora mora » que l’on peut traduire par « tranquille tranquille ».
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